Comment l’ORIF aide à produire une main-d’oeuvre qualifiée

L’Orif, organisation romande pour l’intégration et la formation professionnelle, fête cette année ses 70 ans d’existence au service de personnes nécessitant une attention particulière pour pouvoir intégrer le monde du travail en raison d’un problème de santé.


L’Orif, organisation romande pour l’intégration et la formation professionnelle, fête cette année ses 70 ans d’existence au service de personnes nécessitant une attention particulière pour pouvoir intégrer le monde du travail en raison d’un problème de santé. Actives dans les domaines les plus divers, ses nombreuses entreprises partenaires, tant dans le secteur privé que dans le secteur public, en bénéficient également en accueillant des collaborateurs d’autant plus motivés qu’ils ont mis beaucoup d’énergie pour réussir leur insertion.

De nombreuses personnes qui en avaient besoin ont trouvé leur voie dans la pratique d’une profession grâce à la formation et à l’appui dispensés par l’ORIF

Le monde du travail vit de profonds changements, notamment en raison de la digitalisation de la société. Cela représente un challenge tant pour les personnes les plus fragiles que pour celles qui sont les mieux formées. « Vouloir résoudre ces problèmes en ne regardant que la dimension économique, notamment en aidant financièrement les personnes les plus défavorisées, ne résout pas le problème de fond, celui de donner à chacun l’opportunité de faire un travail utile pour la société et de se sentir respecté pour sa contribution. » André Kudelski, administrateur délégué du Groupe Kudelski et président du conseil d’administration d’Innosuisse, parle d’or dans la tribune que lui a accordé l’Orif en préface de son rapport d’activité pour l’année 2017.

Située à mi-chemin entre le privé et le social, cette organisation romande oeuvre depuis 70 ans de manière très concrète en faveur de la réintégration professionnelle, par l’orientation, la formation et le placement de personnes qui ont dû cesser de pratiquer leur métier ou n’en ont jamais appris en raison d’un problème de santé. Les offices AI sont ses principaux mandants et contributeurs. Depuis quelques années, l’Orif travaille également avec l’aide sociale et le chômage à la réinsertion ou à l’insertion professionnelle de personnes en difficulté.

Créée à Morges en 1948 sous l’appellation « Centre romand d’observation et d’orientation professionnelle pour infirmes (COPAI) », l’Orif n’a cessé de se développer. Aujourd’hui basée à Aigle, elle compte actuellement dix sites de formation professionnelle, répartis dans les six cantons romands. Plus d’une trentaine de métiers y sont enseignés, allant de l’horlogerie à la maçonnerie, en passant par la comptabilité et l’informatique. En 2017, sur l’ensemble de ces sites, 958 jeunes adultes ou adultes ont bénéficié d’une formation, obtenant en fin de parcours par exemple un CFC, une AFP ou un certificat Orif.

L’ORIF oeuvre depuis 70 ans de manière très concrète en faveur de la réintégration professionnelle

LARGE PALETTE DE PRESTATIONS

L’intervention de cette instance se caractérise par de nombreux cas de figure. Cela peut être une formation allant de quelques jours à quelques années lorsqu’elle doit ou veut être complète. L’idéal demeure tout de même la formation en entreprise, laquelle permet une approche plus en phase avec la réalité économique ainsi qu’une intégration plus rapide dans le monde du travail. Un simple accompagnement au placement ou encore un suivi figurent bien sûr aussi au catalogue des prestations. D’une manière générale, ce sont 2206 personnes, dont une petite moitié de jeunes adultes, qui ont bénéficié de prestations en 2017. Pour remplir sa mission d’intégration durable dans le monde du travail, l’organisation comptait 461 collaborateurs cette année-là.

Dominique Rast dirige l’Orif depuis une vingtaine d’années. Il se réjouit de constater que près de 2000 entreprises offrent annuellement leur collaboration, soit pour l’engagement d’une personne, soit pour un stage, ou pour des observations. Toutefois : « les employeurs sont prêts à jouer le jeu, pour autant qu’en cas de problématiques nouvelles, des institutions telles que la nôtre soient à disposition pour leur apporter une solution ». Il rappelle que les entreprises qui souhaitent participer peuvent s’adresser soit à un office AI, soit directement à l’organisation, en contactant son service d’intégration. Elles peuvent alors engager aux conditions du marché du travail des personnes qualifiées qui ont une pleine productivité. Et lorsque celles-ci sont en situation de handicap, c’est l’assurance AI qui compense le manque à gagner avec une rente partielle, la personne revenant alors un peu moins cher à l’employeur. Le placement en entreprise des pupilles de l’Orif est chose relativement aisée sachant que la Suisse connaît pratiquement le plein emploi. Les jobs dans la logistique ou la vente sont cependant le plus souvent les plus à même de correspondre aux capacités du plus grand nombre de bénéficiaires.

UN PRÉCIEUX AUXILIAIRE

« Au-delà des fluctuations conjoncturelles affectant certaines branches professionnelles, il y a tout de même des domaines où il nous est plus difficile de trouver des places, notamment dans les professions de type administratif, comme employé de commerce par exemple, constate Dominique Rast. Cela parce qu’il y a une très forte concurrence dans ce domaine et de nombreux candidats dès lors qu’une place est vacante. » Il demeure que le profil des bénéficiaires s’est modifié au fil des ans. « Nous constatons que près de la moitié d’entre eux ont un problème avec une composante psychologique. Cela nous demande d’adapter notre prise en charge afin de préparer ces gens relativement fragiles à réintégrer un monde du travail dans lequel il y a de plus en plus de pression. »

L’Orif est un précieux auxiliaire des assurances sociales, parfois mises à rude contribution. « Depuis quelques années, nous avons significativement augmenté notre capacité en raison d’une explosion de l’attribution des rentes AI, explique le directeur général. Afin de maîtriser ces coûts et de permettre aux gens de sortir de l’effectif des rentiers, il a largement été fait appel à nous pour des réorientations professionnelles. Les besoins ont donc considérablement augmenté. Ils sont aujourd’hui en phase d’être maîtrisés. Un gros travail a été fait en matière de réadaptation professionnelle. »

L’Orif remplit sa mission à la satisfaction générale, mais quelques nuages planent quant à ses moyens financiers pour le faire. « Il est important de donner plus de temps aux gens pour se former, explique Dominique Rast. Or il a été mis en place ces dernières années des mesures plus courtes parce que moins onéreuses. C’est une bonne chose. Mais il ne faut pas aller trop loin dans cette direction. Pour accéder à un marché du travail de plus en plus difficile, il faut avoir suffisamment de temps pour se préparer, car si les gens s’y lancent alors qu’ils ne sont pas prêts, l’investissement risque d’être perdu, ce qui sera au final encore plus coûteux. »

Jadis connue sous l’appellation Oriph, elle a abandonné la lettre « H » il y a une dizaine d’années, considérant que le mot « handicapé » est marginalisant. « Le bûcheron qui a eu un bras abîmé et que nous avons formé dans l’horlogerie n’est plus une personne handicapée », conclut avec raison Dominique Rast.