METROS: DÉVELOPPEMENT DES M2 ET M3 DE LA PAROLE AUX ACTES

L’Office fédéral des transports a donné en juin son feu vert aux plans de la transformation à 1,3 milliard de francs de la Gare CFF de Lausanne.


L’Office fédéral des transports a donné en juin son feu vert aux plans de la transformation à 1,3 milliard de francs de la Gare CFF de Lausanne. Cette annonce a coïncidé avec la décision du Conseil d’État d’investir 30,2 millions de francs pour financer les travaux de percement d’un nouveau tube sous la gare dans le cadre de la reconfiguration de ligne du M2 jusqu’à la station Lausanne-Flon. Ce crédit est destiné à une reconfiguration essentielle au développement de cette ligne de métro afin de pouvoir absorber la forte augmentation du nombre de personnes qui devraient transiter par la Gare de Lausanne à l’horizon 2025. Ces 30,2 millions ne sont que la première concrétisation des futures infrastructures des métros lausannois. Après une première tranche de financement de près de 20 millions alloués en 2015 par le Grand Conseil, ce montant s’inscrit dans le cadre d’une nouvelle enveloppe cantonale de 153,7 millions comprenant par ailleurs la participation à l’interface multimodale de la gare ainsi qu’à la poursuite des études notamment du futur M3 qui à terme filera jusqu’à La Blécherette.

On passe de la parole aux actes dans le développement des métros lausannois. Le M2 devrait être le premier servi, en raison d’une sacrée contrainte de calendrier. Il s’agit en effet d’une amélioration lourde qui devra se conduire en coordination avec le chantier de la métamorphose de la Gare CFF, en espérant que les synergies l’emporteront sur les complications. Le crédit de 30,2 millions de francs présenté par le Conseil d’État en juin servira à gommer un défaut de naissance particulièrement pénalisant sur cette ligne, à savoir sa voie unique sous la Gare CFF, héritage de la Ficelle de jadis et conservé pour des raison économiques à l’époque. Comment ? La solution retenue n’a pas l’air d’être la plus simple, mais elle se justifie à plusieurs égards. À la hauteur de la station de Grancy, la ligne du M2 subira un décrochement d’une vingtaine de mètres vers l’ouest pour s’enfoncer dans un tunnel parallèle à l’existant, entièrement à double voie, d’une longueur de 258 mètres.

Une nouvelle station Gare CFF, plus proche du futur centre de gravité de la gare de Lausanne, sera créée et dotée de quais nettement plus spacieux. Les voyageurs CFF n’auront plus à traverser la place de la Gare pour passer de l’un à l’autre. La ligne poursuivra sa progression en direction de la station Lausanne-Flon comme maintenant, toujours dans un nouveau tunnel, long de 300 mètres et parallèle à l’actuel. Cette solution permettra par ailleurs de réduire à 6 % la pente de 12 % qui caractérise aujourd’hui le tronçon menant de la Gare CFF à Lausanne- Flon, ce qui en facilitera l’exploitation. Cela aura aussi pour effet de faire passer sa cadence en dessous de la barre des deux minutes.
Le M2 poursuivra ensuite en direction des Croisettes selon son tracé actuel. Le coût de l’ensemble des travaux pour cette première phase est estimé à 245 millions de francs. Que deviendra le futur ancien tracé du M2 à voie unique entre la station de Grancy et la station Gare CFF ? Il sera conservé uniquement à des fins d’exploitation, permettant notamment au M3 d’emprunter le tracé du M2 pour se rendre au centre maintenance de Vennes. À la question maintes fois posée de savoir pourquoi il n’est pas prévu de prolonger ce dernier jusqu’à Épalinges, voire jusqu’au Chalet-à-Gobet, il est répondu que les études sur la densité d’habitants-emplois indiquent un ratio insuffisant pour une desserte par un métro. Et d’ajouter que la Confédération refuserait de toute façon un cofinancement pour une telle prolongation.

LE M3 SE PRÉCISE

Le futur M3 en direction de La Blécherette, c’est une affaire d’une autre envergure. D’un coût global estimé aujourd’hui à 626,8 millions de francs, il se construira par étapes. Il ne faut pas espérer une mise en service avant 2027, soit hélas bien après l’activation des nouveaux quartiers d’habitation des Plaines-du-Loup, site stratégique du projet Métamorphose de la Ville de Lausanne. Dans un premier temps, ce M3, dont le terminus sera l’ancienne station Gare CFF du M2, circulera probablement à la manière d’une navette entre cette gare et l’interface de Lausanne-Flon. Puis il s’enfoncera ultérieurement sous terre, pour filer en direction de La Blécherette en quatre stations intermédiaires (Chauderon, Beaulieu, Casernes et Plaines-du-Loup).

Contrairement au M2 qui voit par endroits la lumière du jour, le M3 circulera entièrement en souterrain, très profondément. D’une longueur totale de 3190 mètres, la ligne aura la particularité de croiser celle du M2 à la hauteur de Saint-Laurent. Ce qui ne manque pas de soulever quelques questions lorsqu’on se remémore les déboires rencontrés à cet endroit par un effondrement du sous-sol lors de la construction du M2. On sait en effet que l’endroit présente une géologie relativement complexe. Réponse : la géologie du lieu est désormais mieux connue. Le tunnel du M3 sera creusé en dessous de celui du M2, dans une géologie plus favorable, à une profondeur située au-delà de la zone instable. Les projets actuels retiennent par ailleurs la construction d’une arrière-gare aux Croisettes, d’une longueur de 325 mètres et d’une largeur de 9 à 12 mètres. Et des extensions de capacité de remisage et d’entretien du garage-atelier de Vennes seront bien sûr indispensables.

LE SUCCÈS FOU DU M2

Premier métro entièrement automatique à circuler en Suisse, le M2 a été mis en exploitation en octobre 2008, avec la projection de transporter à terme 25 millions de passagers par année. Or il avait atteint déjà les 22 millions lors de sa première année complète d’exploitation, et il en a transporté exactement 31 460 593 en 2018. Sa présence a facilité l’implantation de nombreuses activités économiques le long de son parcours. Son tronçon le plus chargé est sans surprise celui entre la Gare CFF et Lausanne-Flon, avec, hors vacances scolaires, 30 000 personnes transportées dans le sens de la montée et 26 000 dans le sens de la descente. Le M2 a non seulement dépassé les pronostics en termes de fréquentation, mais il a aussi augmenté sensiblement sa cadence au fil des ans notamment grâce à la mise en service de trois nouvelles rames. Celle-ci est ainsi passée aux heures de pointe de 6’20 » en 2008 à 3’10 » entre Ouchy et Croisettes, et de 3’10 » à 2’10 » entre Gare et Sallaz.

LA GARE CFF EN 2030

Les infrastructures de la Gare CFF de Lausanne devraient être méconnaissables en 2030 pour faire face à la réalité des flux de passagers d’aujourd’hui et à l’évolution du trafic ferroviaire. Pour faire face aux quelque 200 000 déplacements quotidiens attendus à cet horizon et recevoir des compositions de 400 mètres de long embarquant jusqu’à 1300 passagers, la longueur des quais sera portée à 420 mètres. Mais ce sont surtout les circulations internes qui seront améliorées. Les quais seront élargis à 10,50 contre 8 mètres aujourd’hui. C’est moins que la largeur standard pour une gare principale, mais cette limitation a été retenue afin de minimiser l’empreinte sur les habitations côté sud. En compensation, trois passages inférieurs seront créés afin de limiter la circulation sur les quais. Larges de plus de 20 mètres, contre 8 mètres actuellement, ces passages auront une hauteur portée à 3,80 mètres. Sous les voies CFF se trouveront près de 8000 m2 de surfaces, commerciales et de services, à ajouter à environ 1000 m2 sous la place de la Gare. Enfin, le parking actuel de 450 places sera remplacé par un parking de 300 places seulement au chemin des Épinettes.

La première mouture de projet très complexe d’un coût global de 1,3 milliard de francs, dont 900 millions financés par la Confédération, avait suscité une septantaine d’oppositions lors de la mise à l’enquête. Deux modifications et deux mises à l’enquête plus tard, trente oppositions sont restées, concernant avant tout les surfaces sous la place de la Gare et le front sud du bâtiment. À noter que l’approbation des plans par l’OFT peut encore faire l’objet d’un recours au Tribunal administratif..