LES ROBOTS DE SERVICE DÉBARQUENT

L’engagement d’un robot de service, comme ici à la Brasserie Chauderon de la rue de l’Ale, joint l’utile à l’agréable en mettant aussi de l’animation dans l’établissement.

L’utilisation d’un robot pour servir les plats et desservir les tables à la Brasserie de Chauderon à Lausanne a eu un écho médiatique à la mesure de l’originalité de la chose en Suisse. Il ne s’agit toutefois pas vraiment d’une nouveauté dans le vaste monde de la restauration. Le fabricant chinois de cet appareil affirme en avoir vendu plus de 10 000 dans une soixantaine de pays en 2021 déjà. Placé dans le rond de lumière de l’actualité romande insolite, le recours à ce type d’assistant représente un joli coup de marketing pour cette brasserie lausannoise. D’une manière générale cela illustre probablement une tendance, ne serait-ce que parce qu’un robot identique fonctionne au restaurant asiatique l’Orchidée situé dans le même rue.

« Il ne remplacera jamais une personne, il représente un complément qui nous aide lorsqu’il y a beaucoup de monde. » Grégory Luce, de la Brasserie de Chauderon à la rue de l’Ale, ne cache pas que son robot porte-assiettes Bella – c’est son nom – est aussi là pour mettre de l’animation. Il est vrai que voir la machine aller et venir dans le restaurant, apporter la vaisselle, les plats et desservir les tables selon les données introduites dans sa mémoire de silicium, est une attraction qui vaut le déplacement. Petit problème : Bella a besoin d’espace et ne peut se faufiler dans la salle aussi habilement que le ferait quelqu’un effectuant le même travail. Mais surtout Grégory Luce souligne que le robot n’est pas en concurrence avec du personnel réel, que le contact et la chaleur humaine avec la clientèle sont des qualités essentielles dans un établissement public.
Un robot identique est à l’œuvre au restaurant asiatique l’Orchidée, quelques dizaines de mètres plus loin, dans la même rue. Au micro de la radio romande, le patron a expliqué que la machine a apporté ici une réelle diminution de pénibilité pour les employés assurant le service. Ils n’ont plus à effectuer la grande distance séparant la cuisine de la salle à manger depuis que c’est le robot qui se charge de transporter plats et assiettes. « Les serveurs n’ont plus à courir dans le restaurant et peuvent passer davantage de temps auprès du client. » Selon Pudu Robotics, le fabricant chinois de Bella, passer davantage de temps auprès du client est précisément l’un des avantages à avoir recours à cet appareil. « Les serveurs peuvent offrir une meilleure qualité de service, et peut-être même vendre mieux », souligne-t-il.

Des robots par milliers
Aucun de ces deux établissements ne met en avant la pénurie de personnel, pourtant bien réelle, tant en salle qu’en cuisine, pour justifier l’engagement d’un robot de service. Il demeure qu’en Europe, aux Etats-Unis et en Asie surtout, les ventes de robots serveurs ont explosé depuis 2019 pour ces raisons-là essentiellement. A noter que les restrictions en raison de la pandémie et les recommandations de maintenir une distanciation physique entre les personnes pour minimiser le risque sanitaire ont-elles aussi joué un rôle.
Bientôt un robot de service dans chaque restaurant ? Les syndicats sont prêts à monter au créneau. Président de Gastro-Lausanne, Alexandre Belet, patron du Restaurant populaire à Vers-chez-les-Blancs, calme le jeu : « Nous avons un métier très vaste. Il n’y a pas qu’un modèle de restaurant, mais des centaines. Je pense qu’à l’avenir, ce genre de service conviendra à certains modèles d’affaires, mais pas à l’ensemble de la branche. Il y aura toujours une clientèle qui ira au restaurant pour la chaleur humaine. » La difficulté à trouver du personnel, notamment sur Vaud en raison du salaire minimum en vigueur dans le Canton de Genève, doit à ses yeux être relativisée. « Ce n’est pas tout à fait juste, car avec l’adaptation de la Convention collective au 1er janvier de cette année, on est équivalent voire un peu au-dessus avec le 13e salaire. »