
TERRASSES DE CAFÉS ET RESTAURANTS BIENTÔT TOUTES AU DIAPASON

Désignée en 2019 « Meilleure petite ville du monde » par le prestigieux magazine de voyage anglais Monocle, puis gagnante en 2022 du prix « Ville culturelle émergente » décerné par LCD Berlin (Leading Culture Destinations), Lausanne aux quelque 600 terrasses de cafés et restaurant promet de devenir plus séduisante encore en bannissant de la vue chaises en plastique, tentures et parasols publicitaires et en adoptant un mobilier aux qualités esthétiques validées par la Commune. Cela n’a l’air de rien, mais résulte d’une directive communale qui a fait couler passablement d’encre.
L’histoire ne date pas d’hier, mais elle est désormais censée développer pleinement ses effets. En 2017 déjà, la Municipalité de Lausanne concoctait une règlementation qui allait faire des vagues chez les exploitants de cafés et restaurants de la capitale olympique. Les tenanciers perdaient la liberté d’aménager et meubler les terrasses de leur établissement comme ils l’entendaient. Ils devaient se conformer à des exigences communales en matière de choix du mobilier et de la structure.
Deux interpellations devant le Conseil communal, en 2019, donnèrent lieu à un débat nourri quant à compétence de la Municipalité en la matière. L’Exécutif s’est défendu de vouloir uniformiser quoi que ce soit. Il répondit que sur le principe, il s’appuie sur une disposition de la Loi cantonale sur l’aménagement du territoire (LATC) en apparence anodine, mais ouvrant le large espace d’interprétation des goûts et des couleurs. L’article 86 de la LATC stipule en effet que « La municipalité veille à ce que les constructions, quelle que soit leur destination, ainsi que les aménagements qui lui sont liés, présentent un aspect architectural satisfaisant et s’intègrent à l’environnement. » Puis surtout que « les règlements communaux doivent contenir des dispositions en vue d’éviter l’enlaidissement des localités et de leur abords ».
Une première mouture de règlement avait été rédigée. Alexandre Belet, président de GastroLausanne, se souvient que le comité de cette section de la Capitale olympique de GastroVaud est parvenu à tempérer les ardeurs municipales. L’association se félicite d’avoir pu bannir le spectre d’une imposition pure et dure d’un style de terrasse. Les exploitants n’ont pas été contraints de choisir dans un panel « homologué » comme ils le redoutaient. La liberté individuelle de choix du mobilier de terrasse était préservée, à condition toutefois que celui-ci soit validé par la Ville.
Publiées sur le site de la Ville de Lausanne en janvier 2022, les « Règles explicatives en matière d’aménagement des terrasses » à Lausanne visent à « amener davantage de sobriété et de limiter la publicité, pour une amélioration visuelle de l’espace public ainsi que la préservation des perspectives visuelles et des dégagements ». Les contrevenants peuvent se voir retirer l’autorisation d’exploitation.
L’espace public « élargi »
L’affaire n’est pas banale lorsqu’on sait d’une part que la capitale vaudoise comptait 607 terrasses l’an passé, dont 275 situées sur le domaine public représentant 8665 m2. En 2021, il y avait 528, dont 219 sur le domaine public. La directive communale s’applique tant aux terrasses situées sur le domaine public (redevables d’une redevance en fonction de la surface occupée), qu’à celles d’établissements aménagées sur terrain privé lorsqu’elles sont visibles depuis la voie publique, une dernière exigence, formulée au nom de l’égalité de traitement, qui n’a pas fini de faire tousser.
Les nouvelles règles sont entrées en vigueur après la fin de la crise sanitaire. Le sujet n’en est pas moins resté brûlant. Pierre Antoine Hildbrand, Municipal en charge de l’Economie, s’est efforcé de calmer le jeu en octobre dernier lors de l’assemblée générale de l’association faîtière des restaurateurs et hôteliers lausannois forte de quelque 400 membres. « Le contenu de cette nouvelle règlementation est connu depuis 2018, a-t-il rappelé. Le délai était en avril 2022. Cependant les établissements qui n’ont pas réussi à s’équiper pendant cette période peuvent nous contacter et nous trouvons ensemble des solutions adaptées à chacun. Il faut simplement se manifester et montrer une réelle volonté de se mettre en règle. » GastroLausanne salue cette possibilité, mais aurait préféré une prolongation du délai jusqu’en 2024, afin de ne pas pénaliser les tenanciers qui avaient acheté du mobilier de qualité qui ne correspondrait pas aux exigences actuelles de la Municipalité.
PERMIS, PAS PERMIS…
Lorsque toutes les terrasses concernées seront aux nouvelles normes esthétiques voulues par la Ville pour « redonner une certaine qualité aux espaces publics », elles répondront en substance aux exigences suivantes.
Les meubles en bois et métal sont privilégiés. Les éléments textiles fins et légers des meubles peuvent être admis. Pas de meubles en plastique et en matériaux similaires, y compris en rotin, synthétique, ou composés de tels éléments (plateaux de table, dossiers de chaises, etc.). Pas de couvertes, pergolas et cabanes.
Les éléments végétaux mobiles, tels que les pots de fleurs, peuvent être admis pour autant que ceux-ci demeurent de dimension modeste et qu’ils soient disposés de manière allégée afin que la terrasse ne soit pas entourée exclusivement d’éléments végétaux.
Le matériel publicitaire en faveur de tiers n’est pas admis, en particulier le mobilier publicitaire, tels que les parasols publicitaires ou les volants de stores.
En principe, pas de lampadaires, pas de moquette et tapis. Pas d’installations de « chauffage en plein air » n’utilisant pas des énergies renouvelables.
Service. Aucun relais de service et/ou bar n’est autorisé sur la terrasse.