
Dans quelques mois aura lieu le premier tour des élections communales 2026. Les résultats se jouent dès aujourd’hui. Notamment à la lumière de ce que les forces en présence au Conseil communal ont pu, su ou voulu proposer ou valider face à la Municipalité durant les cinq ans de la législature qui s’achève. À Lausanne, six groupes politiques actifs dans l’actuel conseil se sont mesurés au fil des ans, faisant preuve d’une créativité contrastée et animée, dans un contexte urbain et économique particulièrement tendu. Les président(e)s de ces six formations qui ont fait la pluie et le beau temps face à la Municipalité dressent pour ERL un bilan de leur engagement en matière d’économie notamment, et esquissent les défis à leurs yeux majeurs pour la capitale vaudoise.
Parti Socialiste, 29 sièges
« Cette législature a débuté en pleine pandémie de Covid. Il était important de soutenir le pouvoir d’achat de la population lausannoise en lui permettant notamment de recevoir des bons à dépenser dans les magasins de la place ou de soulager les commerçants en offrant des facilités pour régler leurs loyers. À ce titre, il aurait été bien que les acteurs privés de l’immobilier en fassent autant, ce qui n’a que trop peu été concrétisé… On peut tout de même saluer les propriétaires privés qui ont fait ces gestes.
Grâce à la diversité de ses élues et élus et de sa base militante, le Parti socialiste a su faire entendre sa voix sur de très nombreux fronts. Les inaugurations de la Vaudoise Aréna, du Stade de la Tuilière ou de nouveaux quartiers d’habitation sont de très grandes réalisations qui n’auraient pu être menées sans le soutien actif du PS, en impliquant toujours mieux toutes les personnes élues au sein du groupe et du Conseil communal.
Même si c’est une réussite collective, la mise en service dans un proche avenir du tram t1 est une grande victoire. Cela annonce un renouveau pour toute l’infrastructure de transport avec l’Ouest lausannois. C’est aussi une excellente nouvelle pour les commerçants de la place. On se souvient comme l’apparition du métro m2 en 2008 avait profondément modifié le visage de notre ville. Il avait également donné un sacré coup de fouet à tout le tissu économique vaudois. Un regret : le retard pris dans le développement de la construction du Stade de Coubertin. On espère que tout pourra se décanter dans le courant de la prochaine législature.
Au plan économique, une ville qui investit et qui se développe est déjà en soi une ville attractive pour l’économie dans son ensemble. En participant très activement au Biopôle des Croisettes ou au Pôle sport-santé-alimentation à Beaulieu, Lausanne se donne les moyens d’accueillir des entreprises innovantes en matière de recherche. Cette démarche doit naturellement être menée en partenariat avec les Hautes Écoles dont Lausanne et sa région peuvent s’enorgueillir.
Cela dit, dans le courant des prochaines années, on peut craindre qu’une partie toujours plus importante de la population ne soit plus en mesure de vivre à Lausanne, à cause de la hausse constante des loyers. Pour éviter cette situation, il est essentiel que les pouvoirs publics poursuivent leur politique d’acquisition d’immeubles afin de garantir des loyers abordables. »
Les Vert·e·s, 24 sièges
« La défense d’une économie locale durable et solidaire est une priorité. Nous proposons de créer les Assises du commerce en ville. Et aussi d’établir une stratégie pour faire renaître les commerces en souffrance dans le centre-ville, et créer un fonds de dédommagement pour ceux durement touchés par les chantiers.
A échelle municipale, nous avons œuvré pour soutenir les commerces lausannois, d’abord durant la pandémie, mais plus largement car la Ville détient plus de 40 établissements publics type café/restaurant sur lesquels elle exerce des loyers très bas. Nous voulons notamment renforcer le dialogue avec les commerçantes et commerçants, simplifier certaines démarches administratives, instaurer une personne déléguée aux commerces pour accompagner leurs projets et relayer leurs préoccupations.
Les Verts ont contribué à inscrire Lausanne dans une transition écologique, digitale et sociale qui profite aussi directement à son attractivité économique. Et plus concrètement :
à ce que Lausanne bénéficie de loyers commerciaux publics (gérés par la Ville) parmi les plus bas de Suisse. Car trop de commerces souffrent encore de loyers prohibitifs et d’une concurrence inégale avec les plate-formes en ligne. Regret en effet de voir une ville qui se vide de ses commerces de proximité, au profit d’enseignes internationales ou de locaux vides, incapables de créer du lien social et des emplois locaux.
Nous nous engageons pour soutenir l’économie circulaire, l’innovation durable et l’emploi de proximité, en valorisant aussi le travail non-rémunéré qui contribue au bien vivre ensemble. Et à accompagner les PME dans leurs défis (main-d’œuvre, financements, transition écologique), renforcer les circuits courts entre agriculture locale, artisanat et clientèle, et revitaliser le centre-ville par une stratégie pro-active contre la vacance des arcades.»
Libéraux-Radicaux (PLR), 21 sièges
« Faire entendre sa voix n’a pas été facile, tant la gauche est restée dogmatique. Un des exemples qui illustre le mieux cette attitude est la décision unanime des partis de gauche de désarmer la police, idée contre laquelle le PLR s’est naturellement farouchement opposé.
Depuis le début de la législature, la priorité du PLR a été de répondre aux préoccupations de la population et de relayer l’inquiétude de celles et de ceux qui ne veulent plus d’une insécurité croissante, d’une population marginale qui prend possession de l’espace public, des suppressions massives des places de parc, des embouteillages et des travaux qui dissuadent les gens de rester ou de venir à Lausanne, le tout cumulé à une pression fiscale qui porte de plus en plus atteinte au pouvoir d’achat des lausannois.
Plusieurs interventions ont été faites contre les aménagements de la place de la gare qui ont eu pour effet d’éloigner les arrêts de bus et de favoriser le rassemblement des marginaux devant l’entrée. Mais parmi tous ces combats, une des réussites majeures du PLR reste la convention passée avec la Municipalité qui a permis de maintenir des axes de transit sans réduction de vitesse et des rues piétonnes accessibles pour toutes et tous, améliorant ainsi la fluidité du trafic sur ces axes.
Le soutien aux commerçants et aux restaurateurs sera également primordial pour mettre un terme à l’hémorragie à laquelle on assiste, beaucoup ayant fui la capitale à cause du manque d’accessibilité, de l’insécurité croissante et des nuisances en raison des nombreux travaux. La mise en place d’une véritable planification des chantiers sur une période de 10 ans sera nécessaire pour éviter des chantiers qui se succèdent à un rythme effrayant et continuent de paralyser la Ville.
Nous restons convaincus que le potentiel économique de Lausanne est grand, mais que les conditions cadres doivent être améliorées. La priorisation des dépenses doit devenir une priorité absolue pour garantir un développement économique positif à Lausanne et attirer de nouveaux contribuables. L’implantation de nouvelles entreprises doit être facilitée. Il sera également nécessaire de soutenir et encourager les entreprises à employer et former des apprentis. Un partenariat public-privé est essentiel pour que les efforts déployés par le secteur privé soient profitables à Lausanne et que les entreprises puissent s’épanouir sur le plan économique. »
Ensemble à Gauche, 13 sièges
« Groupe d’opposition, nous nous sommes souvent trouvés à défendre une alternative aux politiques soutenues communément par les groupes socialistes, Verts et PLR. Néanmoins, nous sommes toujours parvenus à dessiner les contours de ce que serait une politique résolument écologiste et solidaire, si nous gouvernions. A savoir notamment garantir la mise en œuvre rigoureuse des mesures du Plan climat 2030 que nous avons initié, tout en réduisant les inégalités sociales à Lausanne, par le renforcement des politiques d’accueil de jour, d’accès au logement et de l’aide d’urgence, le soutien aux ménages modeste et la lutte contre toutes les formes de discriminations, notamment. Nous relevons qu’il a fallu plus de dix ans pour que les autorités reconnaissent l’existence d’un racisme et d’un sexisme structurels dans l’institution policière. S’agissant de la reconnaissance de l’urgence climatique et l’adoption du Plan climat. Nous sommes, par exemple, fiers d’avoir convaincu la Municipalité d’accorder une subvention à l’achat de vélo musculaire pour les jeunes. Nous craignons que Lausanne rate les dernières opportunités qui lui restent pour entamer résolument la bifurcation écologique qu’impose la crise climatique et environnementale, faute de volonté politique.
En matière de soutien, nous avons obtenu l’annualisation des places d’hébergements d’urgence, pour les sans-abris à Lausanne, ainsi que la hausse des budgets de la Soupe populaire. Nous saluons également la mise en place du projet de distribution contrôlée de cannabis Cann-L, que nous avons initié. Enfin, il s’agit de garantir l’accessibilité universelle pour l’accueil de la petite enfance (crèches & garderies). Chaque enfant doit avoir une place proche de chez lui.
Nous défendons le développement d’un modèle économique circulaire, qui favorise les circuits courts, ainsi qu’un développement urbain écologiquement soutenable. Nous voulons encourager les acteurs économiques qui souhaitent contribuer à cette bifurcation. Lausanne pratique une politique de privilèges fiscaux à l’égard de certaines structures (cf. associations sportives internationales et grands groupes) au détriment des plus petits acteurs économiques. A l’inverse, les autorités lausannoises actuelles font preuve de lourdeur sur des sujets dérisoires. A ce sujet, nous sommes fièr·e·s d’avoir obtenu des allégements réglementaires pour les petits commerçants souhaitant ouvrir une terrasse. »
UDC, 7 sièges
Notre priorité est de restaurer la qualité de vie en ville qui se dégrade depuis plusieurs années (chantiers chaotiques, insécurité, mendicité, toxicomanie, saturation des infrastructures, manque de logements…). Lausanne est une ville qui a un immense potentiel, hélas actuellement gaspillé en futilités. Mais elle ne peut pas être une ville où seuls prospèrent le divertissement et les administrations publiques.
Force est de constater que la majorité de gauche du Conseil communal est en mesure d’imposer ses décisions sans tenir compte d’autrui. Un rééquilibrage est indispensable. Il nous faudra argumenter et tâcher de convaincre. En fonction des choix que le Conseil communal fera, nous n’excluons pas de recourir au référendum.
Lausanne peut continuer de compter sur des institutions de formation de premier plan. L’implantation d’un grand groupe, comme Google à Zürich, permettrait la création d’un écosystème de PME et des retombées très intéressantes pour toute la région. Mais il ne faut pas se leurrer : cela n’arrivera pas sans des conditions cadre attrayantes.
En matière économique, il devient urgent de diminuer les contraintes administratives, les taxes et émoluments divers, les embûches au commerce et aux activités économiques. Et de revenir à une politique de mobilité qui concilie qualité de vie en ville et accessibilité du chef-lieu du Canton. Nous nous opposerons à toute nouvelle suppression de places de parc et plaiderons pour accroître les possibilités de stationnement aux emplacements stratégiques, notamment à proximité des commerces. Nous refuserons tout accroissement excessif des effectifs – déjà considérables – de l’administration communale, exception faite de la police où un renforcement est nécessaire.
Lausanne utilise actuellement sa marge de manœuvre pour détériorer les conditions-cadres. Que l’on songe seulement à la politique de mobilité qui confine à la paralysie volontaire de la ville ou au laxisme en matière de sécurité ou de toxicomanie. A l’heure du développement de l’intelligence artificielle, améliorer l’efficience de l’administration sera pour nous une priorité. Nous continuerons de plaider pour une diminution de la fiscalité directe (impôts communaux) et indirecte (taxes sur l’électricité, notamment). Il faut aussi abolir l’impôt sur les divertissements, qui est un boulet à la cheville des organisateurs de grands événements. »
Vert’Libéraux, 6 sièges
« Notre position vert’libérale a permis un dialogue constructif avec tous les partis, influençant des débats sur la mobilité et les finances. Nous avons obtenu une présentation plus transparente du budget communal, reflétant mieux la réalité financière de la ville. Nous ambitionnons également d’accéder à la Municipalité.
Nous avons été libres d’amener un autre angle d’analyse aux dossiers communaux récurrents (mobilité, économie, sécurité) lors des débats et souligné les incohérences de la Municipalité, par exemple lorsqu’il a été révélé que la Ville de Lausanne avait emprunté de l’argent à la FIFA en pleine controverse sur la Coupe du Monde au Qatar. Une grande satisfaction serait de contribuer à réduire la dette communale en faisant gagner à l’administration en efficience.
Nous avons aussi dénoncé une gouvernance financière catastrophique, empêchant une fiscalité équitable pour la classe moyenne. Nous préconisons la création d’un bureau d’un·e délégué·e à l’économie au sein de l’administration dont le rôle serait toutefois indépendant hiérarchiquement de cette dernière, comme c’est le cas par exemple des délégués à la protection des données. Assainir les caisses communales passe aussi par le fait de réduire les charges fixes. Pour cela, nous voulons la mise en place d’une grille salariale avec des annuités calculées en fonction du mérite, de même qu’une indexation décroissante pour les hauts salaires et ne réévaluation du besoin d’un poste à chaque départ, exactement comme cela se fait dans l’administration fédérale.
Souci parmi d’autres : le retard pris de l’administration dans tous les domaines clés garantissant la qualité de vie à Lausanne : la digitalisation, la transition énergétique, la mobilité, la lutte contre les îlots de chaleur, la promotion économique, l’attractivité de la ville pour les familles et jeunes actifs. Nous déplorons une polarisation du débat qui mène à un dialogue de sourds et bloque définitivement Lausanne au début des années 2000, qui fera fuir ses cerveaux, les familles, ses commerces et qui la fera devenir une ville dortoir.
L’économie est la grande oubliée de l’administration communale, alors que c’est l’impôt sur les entreprises qui est parmi celui qui rapporte le plus aux caisses communales. Nous voulons convaincre que ce n’est que grâce à des recettes fiscales plus importantes que l’on pourra faire des investissements massifs dans la transition énergétique, la mobilité de demain, des prestations sociales renforcées et une culture vivante et populaire.
